Orange

Du fil au textile, toujours orangé…

Des textiles orangés étonnants..

Hier, je vous ai montré quelques créations de grands couturiers qui m’avaient étonnée. Cette fois, nous sommes toujours dans le textile mais sur des effets absolument éloignés mais qui parlent tous de représentation. 

Cathédrale de fils d’Olivier ROLLER 

Je ne puis quitter les tons orangés sans vous présenter cette œuvre d’un photographe Olivier ROLLER, qui travaille beaucoup sur les portraits. 

Il a conçu cette cathédrale de fils présentée actuellement au Château d’ Angers mais que je ne peux aller voir…. à la demande des Centres  des monuments Nationaux. 

Voici ce qu’il nous en dit : 

« Une tapisserie, ce sont deux fils entrelacés. J’utiliserai la métaphore du fil pour tisser une cathédrale dans le château d’Angers, lié à la tapisserie par la tenture de l’Apocalypse… Architecturalement, la structure reprendra la forme classique de la cathédrale, en forme de crois latine avec les inventions du Moyen Age (arcs brisés et croisée d’ogives). Cette structure en métal, sera tissée de fils espacés en laissant le regard passer à travers. Dans la symbolique, le métal est le squelette, le fil est la peau…. Au-delà de ces multiples jeux de correspondance, cette installation est liée avec ce qui m’intéresse dans les photographies. En effet, je travaille sur les visages du pouvoir , à la recherche de la matière : traces du temps sur les peux, sur la pierre des statues, sur les fils des tapisseries. Mais elle m’intéresse aussi dans son questionnement sur le sacré, son détournement à l’heure actuelle et la manière dont les gens se l’approprient.  » 

Le jeu de lumière est amplifié par les dégradés de couleurs et les espacements des fils, denses au sol et plus larges au fur et à mesure qu’on monte le regard laissant entrer la lumière divine. 

On entre dans cet espace et au centre, un miroir nous renvoie notre reflet, évocation artistique du selfie, icone de nos temps modernes narcissiques et autocentrés. A travers cette installation c’est aussi une interrogation sur la place de la foi dans nos sociétés, le lieu du sacré. 

Le photographe nous dit aussi : « Le fil est fragile, il est métaphore de la vie, il se détend et peut casser. »

Puisque nous parlons matières et représentation tout autant que couleur orange, je pense aussi au travail des indiens kuna d’Amérique centrale : les molas. Cette technique d’application envers, est aussi représentative de croyances et riche de symboles. 

 Notre photographe nous parlait de laisser passer la lumière. Pour les kunas, c’est aussi le cas lorsqu’on voit les petites fentes comme ici à gauche, prévues pour imiter l’effet de la lumière à travers les roseaux dans leurs maisons, identifiées par des petits triangles colorés. . 

Les molas sont portés par les femmes, gardiennes des maisons. Les nombreux labyrinthes sont là pour empêcher les mauvais esprits et protéger ceux qui portent ces motifs. Ils sont aidés par les dents, également là pour repousser ou croquer ces esprits chagrins. Ces tabliers sont posés au dessus de jupes colorées en portefeuille. Il s’agit plutôt d’un pagne dont la longueur est variable. Dans le costume des kunas, on remarque aussi les Winis, ornements de bras et de jambes perlés aux couleurs assorties aux molas. Ces ornements sont changés tous les deux ou trois semaines. Voyez combien ces tressages sont compliqués à mettre en place !

A l’origine, ces motifs sont ceux des peintures corporelles. Les espagnols vont introduire les tissus et cette technique ne daterait que d’environ 170 ans maximum. Ce sont à chaque mola, des scènes de la vie quotidienne, du passé, des rêves des brodeuses… Outre la technique, on les reconnait aussi par la stylisation des motifs. Végétaux et animaux  prennent une place importante. Pas de place vide, on remplit totalement l’espace du tissu. Plus on met de couleurs variées, et donc de surépaisseurs, plus on prouve sa dexterité. 

Mais, au Panama, cette pratique a pris un tel développement et une telle importance que le gouvernement début XXème siècle, a tenté d’interdire le port du costume devenu « traditionnel ». La résistance est forte tant ces textiles représente cette communauté et les incidents qui en découlent seront appelés « La Révolution des Kunas » en 1925. Le gouvernement finit  par accorder une gestion autonome  de leurs territoires, avec sa propre jurisprudence. 

Il s’agit du 2ème plus petit peuple du monde. Dont une toute petite représentation. Mais ce que je retiens c’est qu’il s’agit d’une peuple matriarcal. Au mariage, c’est l’homme qui rejoint la famille de la femme. Ce sont les femmes qui héritaient et encore actuellement, la vente des molas fait une part belle au travail et à la reconnaissance des femmes dans les villages traditionnels.