Correspondance : De Noëlle à Mr MAGNANT
Cher Monsieur,
J’ai cherché longtemps comment commencer cette lettre, le mot MERCI me vient en tête.
Merci pour ces heures de bonheur ou de tristesse que j’ai passées à vous lire.
Vos récits m’ont permis de me croire encore chez moi ; au travers de vos lignes j’ai senti la lavande, j’ai entendu bêler les troupeaux de moutons, j’ai senti les caillasses sous mes pieds et je me suis brûlée au soleil le long de la Durance.
Des pages et des pages de senteurs, d’émotions et de sensations qui me ramenaient à mon Collet Sisteronais, à mon rocher de la Baume et à ma Citadelle. Ils ne me sont pas propres, mais ils sont tellement présents en moi que je les ai fait miens.
Plus loin que ces lieux familiers, il y a toute les Alpes de Haute Provence qui ont bercé mon enfance, mon adolescence et le début de ma vie d’adulte.
Vous avez su si bien décrire la rudesse de la vie des petites gens de chez nous, la parcimonie de la nature et le caractère âpre des Bas Alpins que j’ai lu et relu tous vos ouvrages, j’ai pleuré, chanté et couru dans la garrigue à côté de vos mots pleins du soleil de chez moi.
Je me suis laissée entraîner dans la forêt de Lure à la suite « des Charbonniers de la mort », j’ai bien cru être Lucinde dans « Un grison d’Arcadie », j’ai aimé « Laure du bout du monde », j’ai parcouru les ruelles sisteronaises dans « Le secret des andrones », suivi votre commissaire Laviolette dans ses péripéties et à chaque fois, grâce à vous j’ai surmonté la tristesse de l’éloignement de notre belle Provence.
Je suis venue un jour, lors d’un court séjour chez moi, jusqu’à la porte de votre maison à Forcalquier, peut être étiez-vous parti explorer les alentours, je ne vous ai pas rencontré et j’en étais fort chagrine. J’aurai dû vous écrire bien avant, mais voilà, comme vous le dites si bien : « … la vie court… ».
Vous avez aussi dit : « la vue de la nature console de tout. » la nature est en effet belle partout et panse bien des maux.
Il n’empêche que je prends toujours autant de plaisir à vous lire et cette période de confinement est propice pour que je me replonge dans un de vos livres. Le dernier en date : « Ma Provence d’heureuse rencontre » c’est le terme « guide secret » qui fait toute la différence !
Je remercie tout particulièrement votre plume pour ceci :
« Quand on a le privilège d’être natif, le monde de votre pays ne se découvre pas de l’extérieur comme une planète inconnue, il ne s’explore pas. On implose en son giron. Orgueil ? Que non pas. Humilité au contraire. Ainsi ai-je surgi au cœur de la Provence liant connaissance avec mon berceau par mes oreilles d’abord. »
Au plaisir, Monsieur, de vous rencontrer entre l’une ou l’autre de vos lignes.
Pierre MAGNANT est un écrivain né en 1922 à Manosque et mort en 2012 à Voiron en Isère.
Il était indéfectiblement attaché à cette partie de la Provence, les Alpes de Haute Provence, il y a situé toute son œuvre entre Digne, Manosque, Sisteron, Forcalquier …