Sylvain TESSON
Aujourd’hui, je ne vous emmène pas dans le monde de la couleur, mais plutôt sur le territoire de l’écriture. Je commence par l’interview d’un écrivain dont j’apprécie beaucoup les textes et qui était sur France Inter ce vendredi 20 mars : Sylvain TESSON
Sylvain Tesson a fait plusieurs expériences de moment de solitude, choisies ou non, et il en a tiré quelques conclusions.
« La seule manière de ne pas succomber dans l’effondrement général, et le seul sur lequel on peut intervenir, c’est l’effondrement de soi-même. Ce que j’ai découvert c’est que la seule chose qu’on puisse faire c’est de ne pas engager une lutte contre le temps ; la guerre arithmétique contre les secondes qui passent, si on fait cela on est écrasé. »
Cesser de lutter contre le temps, mieux vaut le sculpter
Pour l’écrivain, « il ne faut pas lutter contre le passage du temps, mais l’accompagner ». Pour lui, si « nous avons la possibilité aujourd’hui de transformer nos vies sous pression, nos vies hâtives, qui nous soumettaient en permanence à des injections de dire ce qu’on pense, de courir, il nous est offert l’exact contraire. Nous le subissons, mais si nous ne tâchons pas d’en faire quelque chose, c’est la double peine ».
Aujourd’hui, la ligne d’inégalité entre les gens, va se dessiner autour du rapport au temps :
Il y a une autre ligne d’inégalité, c’est le rapport au temps, au silence, à la solitude, il y a des hommes qui goûtent cela. Il y a des gens qui ont avec leur mémoire et leur sensibilité des conversations permanentes.
Giono, Tourgueniev et Zweig au secours du confinement
Sylvain Tesson rappelle que le président Emmanuel Macron a incité les gens à lire. « Je me suis précipité sur deux petits romans qui parlent de la retraite, c’est « Le joueur d’échecs » de Stefan Zweig, et « Le journal d’un homme de trop » de Tourgueniev, c’est la possibilité de s’échapper en lisant ou en écrivant ».
Les auditeurs interpellent Sylvain Tesson pour lui rappeler que les journées confinées sont surchargées en télétravail, scolarisation à domicile, prises de contacts avec les plus fragiles, ils n’ont pas le temps de relire Balzac ni Faulkner.
Tesson cite aussi la fable de La Fontaine, « Les animaux malades de la peste », où l’on voit les animaux s’adonner à toutes sortes de procès, pour chercher des coupables. « Cela révèle toutes nos mauvaises passions, la peur, la jalousie, l’envie, l’amertume. Alors que dans « le Hussard sur le toit », avec Giono, il y a un procès spirituel. Ceux qui avaient peur de la contagion attrapent la maladie, ceux qui n’avaient pas peur, les plus nobles, étaient épargnés ».
Sylvain Tesson : « L’imagination s’est totalement aplatie devant les écrans. Tout d’un coup, elle est obligée de revenir, parce qu’il va falloir occuper les heures. L’imagination va retirer un certain bénéfice de cette crise. »
Sylvain Tesson : « L’imagination s’est totalement aplatie devant les écrans. Tout d’un coup, elle est obligée de revenir, parce qu’il va falloir occuper les heures. L’imagination va retirer un certain bénéfice de cette crise. »